Voila ce que j'ai en stock dans mes archives qui datent !!!!
Du commandement.
Un principe qui nous parait étrange, conférait alors le commandement :
c'était l'antiquité du corps. Un officier qui avait reçu l'autorisation d'acheter le plus ancien régiment de l'armée, se trouvait en droit de commander tous les régiments créés postérieurement au sien, toutefois en l'absence des officiers généraux.
Afin de supprimer les inconvénients de ce système sans toucher à la règle générale, Louvois use d'un habile détour.
Brigadier.
Il créa, en 1667, un grade non vénal, qui pouvait être conféré indistinctement à un colonel, à un lieutenant-colonel, même à un major, et qui rendait l'officier, qui l'obtenait seulement après un long service, le supérieur de tout colonel qui n'en était pas pourvu. C'était le grade de brigadier des armées du roi par brevet particulier de grade dans les troupes, non pas officier général.
Cette création avait encore une autre utilité. Les régiments étaient de force inégale ; les uns avaient un seul, d'autres deux, trois, quatre et même cinq bataillons.
En réunissant toujours quatre bataillons sous le commandement d'un brigadier, on obtenait une parité dans les subdivisions du corps de bataille, qu'il était impossible d'obtenir autrement.
Enfin, cette création permettait de récompenser des lieutenants-colonels bons militaires, mais trop pauvres pour acheter et entretenir un régiment, ce qui était toujours une lourde charge et permettait ainsi l'accès des grades supérieurs de maréchal de camp ou lieutenant général aux citoyens dépourvus de fortune. Les avantages militaires de cette ingénieuse création furent annulés par le maréchal de Belle-Isle qui eut la faiblesse de déclarer l'équivalence des grades de brigadier, mestre de camp ou colonel (6 oct. 1759).
Chaque brigade prenait le nom du plus ancien régiment qui la composait ; par exemple : Normandie à 3 bataillons et Angoumois à 1 bataillon, réunis, s'appelaient la brigade de Normandie.
Colonel.
Le colonel était le propriétaire du régiment parce que lui ou ses prédécesseurs l'avaient levé, formé, instruit.
Il possédait en propre une compagnie, la première créée, qui s'appelait compagnie colonelle.
Dans les temps anciens, lui seul avait accepté les services des autres capitaines, et depuis Charles IX seulement, il ne nommait plus à tous les grades dans le corps ; son pouvoir avait été bien amoindri par les lois et règlements des ministres ; la création du brigadier lui avait enlevé presque toute autorité militaire sur le champ de bataille. Mais il gardait comme un privilège l'obligation morale de subvenir aux besoins de ses capitaines trop peu fortunés pour maintenir leur compagnie en bon état.
La haute noblesse de France n'hésitait pas à s'imposer cette lourde dépense, et transformait ses obligations féodales en une charge volontaire. Exercer la bienfaisance, c'est-à-dire recueillir dans son château quelques vieux officiers, ou de braves soldats qui trouvaient là leurs invalides, était encore une obligation pour elle. Leur fortune et leur sang étaient vraiment au service du roi et de la patrie. Il est vrai de dire aussi que cette noblesse était en compensation exemptée de l'impôt foncier, bien onéreux au reste de la nation.
Major.
Si l'autorité militaire du colonel était annulée par la présence du brigadier, sa fonction administrative était nulle par les attributions du major. Celui-ci n'avait plus de compagnie à commander. Il était nommé au choix parmi les capitaines ayant quinze ans de grade. Il devait surveiller la répartition des sommes allouées aux autres capitaines, était dépositaire des masses communes destinées à l'habillement, l'armement, l'équipement ; s'agissait-il de la vente d'une compagnie, il établissait la situation, fixait les rabais à faire pour le matériel.
Tous les mois il devait envoyer aux capitaines le relevé de leur compte ; il était l'arbitre reconnu entre les officiers dans toutes les contestations. Il n'était pourtant que l'égal des autres capitaines ; ce n'est qu'en 1749 qu'il fut déclaré officier supérieur. Il était en outre chargé de l'instruction des officiers souvent fort jeunes il tenait le contrôle des présents, des charges vacantes. Si un officier venait à mourir, il remplissait les fonctions d'officier ministériel, réglait la succession, vendait lui-même aux enchères les objets mobiliers du défunt, sauf l'épée, qui lui revenait de droit, et percevait même pour cela 5 % d'honoraires sur le prix de la vente.
Il avait en outre à contrôler l'éducation militaire des soldats ; il commandait l'exercice et veillait à la discipline. Comme ces fonctions multiples auraient été accablantes pour un seul homme, on lui adjoignait un aide-major par bataillon. Celui-ci était presque toujours un officier sans fortune qui, avec ce grade, recevait la commission de capitaine. Telle est l'origine du capitaine adjudant-major moderne.
Officiers supérieurs.
Le lieutenant-colonel était le plus ancien capitaine du régiment. Ce grade n'était donc jamais donné au choix. Cet officier, à la guerre, commandait spécialement l'unique ou le 1er bataillon du régiment. Dans les régiments à 2 ou 3 bataillons, l'ancienneté de grade de capitaine conférait le commandement du 2e et du 3e bataillon ; et cependant ces officiers restaient capitaines. Par l'ordonnance du 12 décembre 1743, sans changer les conditions d'avancement par ancienneté, les capitaines commandants de bataillon furent déclarés officiers supérieurs en grade aux capitaines même des autres régiments, mais restant toutefois inférieurs aux lieutenants-colonels. A la réforme de 1749, ils durent même abandonner le commandement de leur compagnie qu'ils ne reprirent qu'en 1763.
Capitaines.
Seul dans toute la hiérarchie militaire, le capitaine de troupes réglées était pécuniairement responsable puisque seul il était chargé de fournir au roi recrues, vêtements, armes, chevaux et matériel. Du traitement que le roi lui accorde dépendront son sort et celui du soldat. Quelles sont donc ses obligations ?
1° Recruter sa troupe. A chaque congé qu'il obtient, il doit personnellement ramener deux soldats ; son lieutenant, ses sergents sont soumis à la même obligation. Le recrutement est le principal souci. Les ordonnances cependant interdisent de payer une recrue d'infanterie plus de 20 livres, et personne ne veut plus s’engager pour 6 ans pour une somme aussi faible, convenable peut-être en 1700, lorsque le salaire journalier d'un manœuvre était de 5 sols, insuffisante lorsque ce salaire, en 1750, est de 20 sols.
2° Le capitaine doit habiller les recrues, fournissant un trousseau, chemises, caleçons, bas, souliers, etc. ; le roi ne fournit que l'étoffe pour l'habit.
3° Le capitaine fournit l'équipement, le fourniment, l'épée ; le roi donne il est vrai le fusil et la baïonnette, mais la réparation et le remplacement en temps de paix sont à la charge du capitaine.
4° Dans la cavalerie, le capitaine doit fournir les chevaux tout harnachés ; pour chaque cheval ainsi équipé, le roi ne donne que 200 livres. En 1743, vu l'impossibilité absolue, le roi donna gratuitement les chevaux nus.
5° Le capitaine doit posséder un matériel de campement, un manteau d'armes, une tente pour 8 hommes, des marmites, etc. , 10 outils propres à remuer la terre, il doit posséder deux chevaux pour lui-même et entretenir un valet qui ne peut compter comme soldat dans la compagnie.
Que reçoit-il en échange de ces fournitures ?
1° Une solde personnelle de 3 livres par jour ;
2° 150 livres d'indemnité annuelle pour frais de recrues.
3° 65 livres par tête de soldat admis lors de la revue du commissaire des guerres, l'engagement dure 6 ans. La compagnie ayant 40 hommes, c'est donc 6 recrues par an qu'il faut faire.
4° L’ustensile, somme de 750 livres en temps de paix, qui double en temps de guerre, lui est accordée pour entretenir les habits les armes, le matériel de 40 hommes pendant 1 an ; à laquelle somme il faut ajouter 2 sols par jour retenus sur la solde du soldat pour le trousseau de linge et chaussure, soit un total de 2100 livres annuelles pour entretenir 40 hommes, 2 chevaux et 1 domestique, somme dérisoire, même pour l’époque. Qui donc subvenait à la détresse des capitaines ? Leur fortune personnelle ou la bourse du colonel, quand celui-ci veillait à son régiment.
Sinon le capitaine s’endettait. Aussi n’y a-t-il aucune exagération dans les plaintes de beaucoup de braves officiers qui se déclaraient ruinés au service du roi. Une compagnie, quelque bien tenue qu’elle fût, ne pouvait être vendue plus cher que le taux fixé par les ordonnances, soit 5,000 livres dans l’infanterie, 7,000 livres dans les dragons, 8,000 et 10,000 dans la cavalerie.
Commissaire des guerres.
Une compagnie administrée avec la plus sage économie pouvait ^à peine permettre au capitaine une vie décente. Mal gérée, elle menait infailliblement à la ruine. Ainsi pressé par la nécessité, on aurait pu être tenté de faire des retenues illégales sur la solde pourtant bien modeste du soldat, faire des fournitures de qualité inférieure, faire payer pour présents des soldats fictifs appelés passe-volants. C’est ce qui avait lieu quelquefois. Mais pour réprimer ces abus, il existait un personnage qui n’a point d’analogue dans les armées modernes : c’est le commissaire des guerres.
Indépendant des militaires, armé d’un pouvoir royal, ce fonctionnaire pouvait exercer un contrôle sérieux sur tous les capitaines de sa juridiction, à condition d'être énergiquement et résolument soutenu toujours et quand même par le ministre.
Créés par François 1er, ces magistrats avaient vu leurs pouvoirs étendus par Richelieu en 1635 et complétés par Louvois en 1668.
La charge de commissaire des guerres était héréditaire et vénale pour garantir une indépendance absolue Il fallait pour en être pourvu, avoir 25 ans au moins. L'inconvénient du système était que si le titulaire était incapable, le ministre n'avait d'autre pouvoir que de ne pas l'employer. La noblesse personnelle avec ses privilèges et exemptions, etc., était attachée à la possession de cette charge qui conférait les titres d'écuyer et conseiller d'Etat.
Tous les commissaires des guerres employés correspondaient directement sans intermédiaire avec le ministre et rendaient compte de toutes les choses ayant un rapport quelconque avec l'armée et les fournitures de la guerre. Ils avaient la police, conduite, discipline des officiers de tout grade dans les troupes soldées ou non, milices, bans, gardes de gouverneurs ou autres militaires sous les armes. Ils devaient faire la revue mensuelle de toutes les compagnies de troupes de leur résidence ou de passage. Ils prononçaient sans appel l'interdiction des officiers, arrêts d'appointements ou de personne.
Ces arrêts ne pouvaient être levés que par un ordre spécial et formel du roi. Ils avaient l'obligation de faire réformer tout homme ou cheval trop jeune, trop vieux ou incapable de service. Ils devaient réformer aussi tout objet d'habillement, d'équipement, de harnachement, d'armement présenté en mauvais état. Les colonels étaient subordonnés aux commissaires des guerres comme chefs de compagnie, quelque grade qu'ils occupassent d'ailleurs.
Les commissaires ordinaires des guerres recevaient l'autorisation d'acheter la charge de commissaire provincial après avoir donné des preuves de zèle dans l'accomplissement de leurs fonctions. L’autorité conférée par le titre de provincial n'était pas supérieure, mais la confiance du ministre était plus grande. C'était aussi parmi les provinciaux que le ministre choisissait les ordonnateurs des dépenses pour les armées en campagnes, fonctions aujourd'hui dévolues à l'intendance militaire. Cette dernière position conférait la noblesse héréditaire avec tout son cortège d'exemptions et de privilèges. Cet office ne pouvait être vendu.
Les charges de commissaires des guerres se payaient en 1740, selon leur importance :
3e classe, comm. ordinaire, 33,000 livres avec 1,300 livres de gages annuels.
2e classe, --- 40,000 livres avec 1,600 livres de gages annuels.
1re classe, --- 55,000 livres avec 2,200 livres de gages annuels.
En outre de ces gages qui représentaient l'intérêt des sommes déboursées, le roi donnait 3;000 livres d'appointements à ceux qui étaient employés.
Une charge de commissaire provincial valait 80,000 livres avec 4,000 livres de gages annuels et 3,600 livres d'appointements. Employés, les commissaires recevaient journellement 6 rations de vivres et 4 de fourrage, plus 2 charges de sel par an.
Ces magistrats choisissaient, sous leur responsabilité personnelle, tous leurs employés. Ils touchaient, en outre, des honoraires pour frais de chancellerie lorsqu'ils délivraient un brevet ou certificat de serment à un officier pourvu d'une commission quelconque. En effet, à chaque grade conféré, l'officier, le colonel même, devait prêter serment la main nue fiant le commissaire. A la fin de la formule du serment, le commissaire ajoutait : Vous déclarez n'avoir donné ni promis aucune somme pour obtenir l'emploi dont vous êtes pourvu et promettez .de ne signer aucun concordat ni consentement, soit verbal, soit écrit, à aucune convention contraire aux défenses de Sa Majesté.
Le certificat de serment tenait lieu dans les armées de lettres de service ; les droits à payer étaient proportionnels au grade et, échelonnés depuis 15 livres pour le cornette ou le sous-lieutenant jusqu'à 50 livres, pour le colonel.
Dans toutes les cérémonies militaires, même au conseil de guerre, le commissaire des guerres assistait à la délibération, assis à gauche du plus haut chef militaire, de quelque grade qu'il fût.
Convaincu du crime de concussion, d'entente avec les officiers dans l'accomplissement des devoirs de sa charge, le commissaire, outre les peines corporelles, voyait confisquer au profit du roi la charge qu’il avait payée.
Ce personnage si puissant, avait pourtant un singulier rôle dans la pratique. Il ne pouvait rien signer seul. Il avait besoin constamment d'un assesseur qui, par sa signature, devait, confirmer les assertions de son rapport. C'était la fonction du contrôleur des guerres. Il y avait autant de contrôleurs que de commissaires, 140. Toutes les pièces, observations, bordereaux, etc., devaient recevoir la double visa du commissaire et du contrôleur.
Si celui-ci n'était pas présent, le commissaire devait faire témoigner ses dires par le gouverneur de la place, un lieutenant du roi (sous-gouverneur), un major de place, ou même le syndic, maire, échevin, marguillier du lieu où avait lieu la revue ou la fourniture.
Outre le contrôle des troupes, les commissaires avaient encore à veiller au, bon entretien, des casernes, corps de gardes ou autres bâtiments affectés à un service militaire quelconque, sauf les fortifications proprement dites. Ils surveillaient aussi la stricte exécution des marchés qu'ils ne devaient jamais sous aucun prétexte, contracter eux-mêmes, laissant ce soin aux intendants de province en temps de paix, à l'ordonnateur, en temps de guerre. Ils veillaient, et c'était une de leurs pénibles occupations, à la distribution des étapes