Salut à tous,
Quelques infos (ou confirmations d'infos) en complément de ce qui a déjà été dit ici, et suite à une discussion avec un ancien du 23ème RIC:
Les Français sont hétéroclites au possible, en particulier en 46-47. Lui-même est arrivé en Indo le 7 janvier 47. Pour toute l'année 47, sa compagnie n'a reçu que 2 paires de chaussures. La plupart du temps, les gars étaient pieds nus. En opération, ils portaient généralement ce qu'ils pouvaient se fournir "dans le civil" (surtout des baskets).
Pour les uniformes, c'est pareil, voire pire.
En France, en septembre ou octobre 46, mon caporal est équipé en gros drap français (il précise que les uniformes US étaient de bien meilleure qualité) avec casque anglais.
En arrivant en Indo, il est incorporé, "avec une centaine de camarades", au I/23°RIC qui est équipé à l'américaine, mais il portera son casque anglais "pendant plusieurs mois" (c'est peut-être aussi le cas des autres nouveaux arrivants).
Courant 47, j'ai pu voir plusieurs photos qui confirme qu'il sera affublé du casque US, mais il m'a aussi dit qu'ils avaient même porté des casques japonais pendant un temps!
Concernant le casque anglais, il se marrait en m'expliquant que la coiffe intérieure (le casque léger, quoi) était fixée au casque proprement dit par une unique vis au sommet du crâne. Alors si cette vis était mal serrée et que le gars faisait un mouvement trop brusque de la tête, il se retrouvait avec une assiette de métal qui lui tournait sur la tête, façon girouette

.
Côté armement, il reçoit un fusil américain 1917 (Enfield) en arrivant. Puis il fait mention d'autres armes, comme une carabine M1, une Thompson (il possède plusieurs en même temps). Il a aussi un p38 qu'il avait récupéré en 45 en Allemagne, je crois.
Lors d'une embuscade de nuit en avril 47, il fait mention d'un PM Beretta appartenant à sa section, arme "non affectée, qui servait à l'occasion pour tous, pour ce genre de mission".
Son unité, en poste à Tiên Yên, sera dotée de MAT49 en remplacement des MAS38 le 28 décembre 1950.
Pour l'artillerie, il mentionne un obusier de 3,7 pouces/94mm (anglais, reliquat des combats de Malaisie) qui arrive au poste de Trang Bach fin jour de février 49. Il n'ont pas d'artilleurs, ni d'appareil de pointage sur la pièce, mais les gradés ont droit à une formation sommaire et les munitions ne manquent pas: ils peuvent tirer jusqu'à 300 obus par semaine.
Devenu chef de la section d'appui de sa compagnie, il reçoit le canon SR 57mm le 1° juin 1951.
Le sentiment d'être "oubliés" prédomine. Dans son "journal de marche", il fait un état des lieux en juin 47: l'état des armes et des fringues est déplorable. Leurs fusils rayés ont tellement donné qu'ils sont quasiment lisses. "Les chaussures, les équipements et les uniformes tombent en lambeaux et ne sont pas remplacés" écrit-il. Malgré cela, il précise que "le moral et l'état d'esprit reste excellents".
Il m'a aussi dit avoir porté des vêtements pris sur les prisonniers viêts.
Autre petite anecdote

: le même journal de marche, en octobre 50, parle de Lang Son. Le I/23° RIC fait partie des renforts envoyés pour tenter d'enrayer le désastre de la RC4. En fait, on détruit tout ce qu'on peut avant d'évacuer la ville en laissant des quantités immenses de matériel aux VM. Mais on ne fait pas sauter les munitions de peur d'alarmer l'ennemi et déclencher une attaque à outrance pendant la retraite qui est déjà assez bordélique comme ça. Alors on se contente de brûler des uniformes neufs. Les gars du RIC sont écœurés parce qu'ils portent des habits usés jusqu'à la corne et le colonel qui supervise la destruction leur interdit formellement de changer leurs vêtements avec ceux qu'ils sont en train de cramer…
Franck